« Je crois qu’il me fait la gueule »

17/06/2018 Bonjour à toutes et à tous,
Je crois qu'il me fait la gueule - Crédit photo izart.fr

Je crois qu’il me fait la gueule – Crédit photo izart.fr

En milieu de matinée, quand je suis entrée dans sa chambre, il ronflait bien fort !

Le personnel soignant m’expliqua  qu’on le laissait tranquillement émerger le matin dorénavant.

Bonne mesure, je me  souviens qu’avant il râlait justement car on le réveillait trop tôt.

Pour la gestion du service, évidemment…

Mais après lui avoir tapoté la main, parlé bien près de l’oreille, rien… il continuait de ronfler !

Enfin si, il m’avait un peu détaillée du regard, après avoir ouvert un oeil puis deux, mais les avait refermés aussitôt.

Et à son air, je savais bien qu’il m’avait bien reconnue.

Je crois qu’il me fait la gueule, expliquais-je alors au personnel, convaincu que ma visite lui ferait grand plaisir…

Et ben c’était raté !

Tandis que ma présence était évoquée durant sa toilette, même une fois assis dans son fauteuil, il ne répondait toujours pas.

Comme je lui suggérai de descendre prendre l’air, il acquiesça d’un hochement de tête.

Dehors, soufflait un petit vent agréable.

Il l’avait senti parcourir sa peau.

Probablement qu’il n’avait pas remis le nez dehors depuis des semaines, voire des mois.

Il continuait à ne pas desserrer les mâchoires.

Mais détaillait à présent la colline d’en face où il allait marcher jadis tous les jours.

Alors qu’il fermait les yeux, je sentis une grande colère monter en lui.

Bouclé dans un fauteuil, incapable du moindre mouvement.

Ses doigts tapotaient nerveusement le fauteuil.

Papa, si seulement tu avais pris soin de toi.

Si seulement tu avais posé tes valises pleines de haine et de rancœur.

Visiblement il s’y cramponnait toujours bien.

J’ai adressé un petit clin d’œil au papillon tout juste accroché avant de tourner le fauteuil muet devant la fenêtre.

Bien à vous,

Isabelle