« Afrique ou la magie de l’art »

01/10/2013 Bonjour à toutes et à tous,

Afrique ou la magie de l'art - Crédit photo izart.fr

Afrique ou la magie de l’art – Crédit photo izart.fr

10:30, le feu démarre enfin.

La pluie, qui tombe depuis le lever du jour, n’est guère propice à l’allumage des bûches, disposées sur une tôle à même le sol…

Installé à l’abri sous un préau, Mohamadi Ouedraogo, sculpteur de bronze, prépare déjà la cire d’abeilles, prélevant dans l’épaisse galette, au couteau, de larges tranches qu’il malaxe au fur et à mesure de leur passage sous la flamme.

Lorsque la boule de cire ainsi formée est assez malléable, elle peut prendre forme selon l’inspiration, tout en la réchauffant dans le feu lorsqu’elle durcit trop.

La cire est une matière très agréable à travailler.

Sa texture est souple et douce, chaude.

Le grain très fin, permet un travail rapide et précis, des torsions sans cassure ni craquelure.

Au durcissage, point de rétrécissement ni de modification de la pièce d’origine.

Le mélange de terre, récoltée localement dans le quartier du Gros Bois, à Chazay d’Azergues et de crottin de cheval, pour conférer une texture fibreuse à l’enduit, va permettre d’enrober la figure de cire.

L’objet va alors être soigneusement recouvert de plusieurs couches de cet enduit, les parties fragiles étant renforcées par des tiges de fer bloquées dans la terre, premier contact de la cire et de la terre.

Cire

Cire

Mais la conception de la pièce est l’étape la plus rapide de la technique.

Il va falloir attendre que les moules de terre sèchent, et la pluie qui redouble n’est guère favorable à leur séchage…

Pour accélérer le processus, Madi va les placer autour du feu.

Plus tard, on verra que cela n’est pas sans conséquence sur l’objet de bronze qui en résultera.

Pendant ce temps, le four artisanal, conçu sur place à partir d’un fut d’huile habillé du même mélange de terre et de crottin va être démarré.

Équipé d’un tube métallique horizontal à la base qui recevra un système de soufflerie pour activer sa combustion, il va recevoir le creuset destiné à recueillir les matériaux à fondre.

J’étais vraiment loin de me douter que la caisse de robinets, détendeurs et autres tuyaux de plombiers posée à mes pieds allait constituer le métal en fusion !!!

Moules en terre

Moules en terre

Le moule de terre étant placé dans le feu pour sa cuisson, premier contact entre la terre et le feu qui va durer près de deux heures.

La cire à l’intérieur, s’est liquéfiée sous l’effet de la chaleur, elle est recueillie au fur et à mesure de son vidage, pour resservir ultérieurement.

Les pièces de terre extrudées sont calées verticalement, commence alors la magie du coulage du métal en fusion, longue langue de feu rouge et fumante qui doit minutieusement remplir le moule, première rencontre entre la terre et le métal

L’opération suivante va consister à refroidir le moulage rempli de bronze, en le saupoudrant d’eau.

Il est 18:00, la pluie n’a pas cessé de la journée, la fatigue nous gagne, mais que dire face à celle de Madi qui n’a pas quitté son atelier improvisé depuis huit heures déjà et travaille sans relâche et sans plainte, secondé par un collègue en fin de journée…

Afrique ou la magie de l’art avec ce moment intense, les moules de terre sont brisés, nous sommes sans voix devant l’opération finale.

Fruit du travail, de la patience et de la création, l’objet est accouché sous nos yeux, prend forme, extirpé de sa chrysalide rêche et noircie.

Le deviner, le toucher, le palper, le caresser, le peser, le reconnaître comme sien, prolongement de soi, ultime rencontre.

19:30, quelque coups de lime, beaucoup de joie et une grande fatigue plus tard, je vais poser précieusement ma pièce dans mon sac à main et reprendre contact avec la réalité.

Mohamadi OUEDRAOGO  Sculpteur de bronze – Ouagadougou – Burkina Faso

+226 76 57 91 39

Invité de la troisième édition Africazergues à Chazay d’Azergues (69), un projet qui marque les 30 ans de Partage Tiers Monde Val d’Azergues et les 20 ans de participation au développement de 4 villages de brousse au Burkina-Faso dénommés Gadghin.

Malgré le temps, malgré le peu de sensibilisation du public, vous étiez là, parmi tous les porteurs de ce magnifique projet.

Respect !

Spéciale dédicace à Madi qui a pris l’avion à midi hier, pour retrouver les siens et le soleil après trois mois passés en France à installer son atelier de bronze, opération qu’il renouvelle deux fois par an avec ses collègues pour vivre de son art et le faire partager grâce aux solidarités locales.

PS :

La participation au stage de bronze était de 35€ pour une durée de deux heures, il n’y a que la durée qui a été modifiée.

Bien à vous,

Isabelle