« En écoutant Adèle Haenel »

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07/07/2023 Bonjour à toutes et à tous,

En écoutant Adèle Haenel - Crédit photo izart.fr
En écoutant Adèle Haenel – Crédit photo izart.fr

En écoutant Adèle Haenel s’exprimer dans une interview, je comprends soudain pourquoi, l’autre jour, j’ai si mal vécu d’être témoin d’une conversation.

Dans les épiceries c’est comme chez le coiffeur, tout le monde croise tout le monde et un tas de choses se racontent, au gré des rencontres.

Deux personnes devisent dans un rayon du magasin quand une troisième se joint à elles.

Cette dernière fait remarquer à l’une des deux que depuis qu’elle a décidé de ne plus côtoyer telle autre personne, cette dernière paraît en souffrir.

La personne incriminée est surprise par la remarque et justifie son geste comme venant en réponse à l’agression dont elle a été victime.

C’est là que le bât blesse, justement.

Quand on fait passer la victime pour responsable de son propre malheur, et pire, du malheur de l’agresseur, c’est de la manipulation.

Adèle Haenel, dans son intervention, le souligne bien, notamment dans les cas de violences sexuelles.

Comment étiez-vous habillée ? Aviez-vous bu ? Que faisiez-vous seule à cet endroit ? autant de questions qui remettent en question le statut de victime.

Plaçant soudain la victime dans le statut de responsable de son agression, insidieusement, on inverse les rôles.

La culpabilité de l’agresseur se transpose à la victime qui aurait provoqué le truc en gros, de par son habillement, comportement, blablabla…

Précisément, c’est de là qu’est né mon malaise lié à la conversation de ces trois personnes, mais je n’ai compris qu’après coup.

Une première personne se fait donc agresser par une seconde, mais on assiste à une inversion des rôles, volontairement ou pas.

Faire porter à la première la culpabilité de la souffrance de la seconde avec laquelle elle a décidé de rompre tout contact, ça sonne comme de la manipulation.

C’est ça, on inverse les rôles et les agresseurs continuent d’agresser tranquillement et en toute impunité.

Toute la litanie des « elle m’a mis à bout, elle m’a cherché, elle sait que je m’énerve facilement… » on pourrait en tapisser les tribunaux.

Seulement, la victime qui peine à s’exprimer avec tout le poids du trauma toujours en elle, prend en pleine poire la double peine.

Ton agresseur souffre de ton attitude, tu pourrais faire un petit effort et… retourner le voir pour qu’il ait moins de peine, quand même !

Je suis abasourdie de voir comment impunément se perpétue le déni face à la parole et la souffrance des victimes.

On en viendrait presque à plaindre les bourreaux.

N’inversons pas les rôles, s’il vous plaît, c’est trop facile.

Un agresseur reste un agresseur, zéro compassion.

Une victime reste une victime, prenons en considération sa plainte, parce que c’est elle qui souffre et a besoin qu’on lui vienne en aide.

Bien à vous,

Isabelle