« Avancer main dans la main avec Alzheimer »

16/06/2017 Bonjour à toutes et à tous,

Avancer main dans la main avec Alzheimer - Crédit photo izart.fr

Avancer main dans la main avec Alzheimer – Crédit photo izart.fr

« – Papa, coucou, c’est moi !

– …

– Papa, nous sommes venus te rendre visite avec J., regarde nous t’apportons des cerises du jardin 🙂

– C’est… Micheline (une de ses soeurs décédées) ?

– Non, c’est moi, Isabelle, ta fille !

– …

– Tu me fais la bise quand même 🙂

– Je te l’ai déjà faite la semaine dernière… »

Bon, ben voilà c’est dit, et nous n’aurons plus aucune parole de sa part jusqu’à notre départ.

On ne saura jamais si les cerises sont bonnes, mais au moins il les mange avec plaisir.

Tant mieux, le personnel soignant et médical qui m’a donné rendez-vous ce matin, alerté par la dégradation de l’état général de papa, dit qu’il a perdu 3 kg cette semaine.

Et refuse de plus en plus de s’alimenter.

Et de boire.

Et arrache les perfusions posées pour l’hydrater.

Tout en grignotant et en buvant à sa table, je lui caresse doucement la main.

Oui, maintenant papa, il va falloir avancer main dans la main avec Alzheimer de plus en plus présent entre nous, surtout depuis la mort de maman.

Et faire disparaître ton bâton de marche, car les voisin-e-s de table n’aiment pas son utilisation à leur encontre.

Et de t’éviter les sorties seul en extérieur, qui se font sans plus aucune notion de durée, de spatialité et… de danger.

Les blessures du corps, identifiées, quantifiées, sont prises en considération parce qu’elles se manifestent par de la douleur, des fractures, des luxations, des immobilisations.

Mais que dire de nos maux, de nos blessures de l’âme, si ce n’est qu’elles devraient, de même, toujours être prises en main et au sérieux, dès le plus jeune âge.

Le temps ne fait pas de l’autoguérison.

Le temps fait de l’aggravation.

Et voilà qu’un jour Alzheimer arrive au secours, comme pour lâcher la soupape de trop d’accumulation.

G-R-A-B-A-T-A-I-R-E a dit le médecin gériatre.

Ta gueule Larousse, on t’a pas sonné !

Je t’amènerai encore des cerises la semaine prochaine, mon petit papa, j’irai même en acheter quand il n’y en aura plus au jardin.

Bien à vous,

Isabelle